Depuis plus de douze mois notre pays vit sous un régime d’exception et pour la cinquième fois depuis les attentats du 13 novembre 2015, le gouvernement propose de proroger l’état d’urgence. Or, il est plus qu’utile d’interroger le gouvernement sur la pertinence de maintenir notre pays sous ce régime, et d’exprimer une nouvelle fois notre refus de voir ce dispositif s’inscrire dans la durée.
Depuis le début, je pointe du doigt les dérives qu’il produit et j’ai conscience qu’il sera très dur de sortir de ce régime d’exception sur fond de précampagne présidentielle susceptible de donner lieu à une surenchère sécuritaire.
Divers rapports parlementaires mettent clairement en cause l’efficacité de l’état d’urgence. La commission d’enquête sur les moyens mis en œuvre par l’État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 indique ainsi que« force est de constater que les mesures prises pendant l’état d’urgence n’ont pas été évoquées par les spécialistes de la lutte contre le terrorisme comme jouant un rôle particulier dans celle-ci»
Je fais également mien l’avis du Conseil d’Etat publié le 8 décembre : « Les renouvellements de l’état d’urgence ne sauraient se succéder indéfiniment et que l’état d’urgence doit demeurer temporaire. Les menaces durables ou permanentes doivent être traitées, dans le cadre de l’Etat de droit, par les instruments permanents de la lutte contre le terrorisme »
Je partage la conviction que la voie judiciaire demeure l’outil prééminent de la lutte antiterroriste. D’autant plus que depuis un an, le Parlement a beaucoup légiféré pour faire face au terrorisme. La France s’est d’ailleurs dotée d’une des lois antiterroristes parmi les plus sévères en Europe.
Dans ce contexte, je suis d’abord intervenu dans le cadre de la présentation du rapport de contrôle parlementaire de l’état d’urgence
J’ai eu l’occasion de saluer le travail remarquable effectué par les rapporteurs de la commission de contrôle parlementaire, M. Dominique Raimbourg et M. Jean-Frédéric Poisson qui constatent notamment «qu’une très grande majorité d’arrêtés ne vise pas de circonstances particulières » et ne relèvent « plus d’une logique d’urgence et d’exception mais, en fait, se substituent aux mesures de droit commun».
Lors du cinquième projet de loi de prorogation de l’état d’urgence, je suis intervenu en commission des lois pour rappeler que le premier rapport d’évaluation reconnaissait qu’au-delà de deux semaines, la brutalité de l’effet de surprise passé, le dispositif perdait de sa force et de sa pertinence. J’ai également souligné que l’état d’urgence ne peut avoir d’autres fins que de lutter contre le terrorisme.
Retrouvez mon intervention lors des débats en commission des lois
Le 13 décembre 2016, j’ai déposé une motion de renvoi en commission pour le projet de loi portant sur la prorogation de l’état d’urgence.
J’estime en effet qu’un tel texte devrait être âprement débattu et soumis à un débat démocratique. D’autant plus que la reconduction sans débat après un an d’évaluation est inacceptable. En effet, le travail d’évaluation de plus d’un an de l’état d’urgence n’a pas eu lieu, et les questions formulées de même que les préconisations du contrôle parlementaire n’ont pu être discutées avec le ministre de l’intérieur, absent lors du débat en commission.
Retrouvez mon intervention en séance :
Il est inconcevable l’état d’urgence prenne l’allure d’un dispositif ordinaire de lutte contre le terrorisme et d’un état permanent de maintien de l’ordre public.